SARAH & DEFIEUX
Avocats à la Cour
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L’implication selon la loi BADINTER, une notion toujours en voie d’extension.


Un motocycliste a perdu le contrôle de son véhicule alors qu’il effectuait le dépassement par la gauche d’un automobiliste qui le précédait et avait ralenti dans une montée.

Au cours de cette manœuvre, il a heurté une chèvre qui, venant du bas-côté gauche de la route, avait soudainement traversé la chaussée et il s’est blessé.

La cour d’appel a débouté le motocycliste de ses demandes formulées à l’encontre de l’automobiliste et de son assureur en retenant que l’automobile n’était pas impliquée dans l’accident.

Pour les juges du fond, s'il n'est pas contesté que le premier a ralenti dans une montée avant de se faire dépasser par la seconde, en accélération, la motocyclette serait, de toute façon et même sans la présence de l’automobile, entrée en collision avec la chèvre qu'elle n'aurait pu éviter eu égard à la vitesse de 70 km/heure à laquelle circulait le motard avant d'accélérer pour effectuer le dépassement, de sorte que ce véhicule n'a joué aucun rôle dans la collision.

La cassation est prononcée dès lors qu’il était établi que le motard avait entrepris de dépasser le véhicule le précédant à la suite du ralentissement de ce dernier et que l'accident était survenu au cours de ce dépassement, ce dont il résultait que ce véhicule avait joué un rôle dans sa réalisation.

 

On rappellera que la loi du 5 juillet 1985 dite « loi BADINTER » a établi un système de responsabilité autonome dans un souci d'indemnisation systématique des victimes.

Pour bénéficier de ce droit à indemnisation, trois conditions sont nécessaires : un accident de la circulation, un véhicule terrestre à moteur, et l'implication de ce véhicule dans l'accident.

C’est sur cette troisième condition que porte l’arrêt commenté.

L'implication est le point central du dispositif de la loi BADINTER : il y a implication dès qu'un véhicule est intervenu à quelque titre que ce soit dans un accident de la circulation.

L’implication est retenue sans discussions dès lors qu’il y a contact matériel avec le véhicule.

En l’absence de contact matériel, la Cour de cassation retient de manière constante qu’ « un véhicule terrestre à moteur est impliqué dans un accident de la circulation dès lors qu'il a joué un rôle quelconque dans sa réalisation » (Cass. 2e civ., 24 févr. 2000, n° 98-18.448 ; Cass. 2e civ., 27 sept. 2001, n° 99-18.978).

Est donc impliqué, au sens de l'article 1er de la loi du 5 juillet 1985, tout véhicule qui est intervenu à un titre quelconque dans la survenance de l'accident (Cass. 2e civ., 4 juill. 2007, n° 06-14.484).

A l’inverse, n'est pas impliqué le véhicule qui n'a pas perturbé la victime, ou n'a pas eu une quelconque influence sur sa conduite, ou n'a pas accru de quelque manière que ce soit l'étendue de son dommage (Cass. 2e civ., 14 juin 2012, n° 11-18.074).

Et la seule présence d'un véhicule sur les lieux d'un accident de la circulation ne suffit pas à caractériser son implication au sens de l'article 1er de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 (Cass. 2e civ., 13 déc. 2012, n° 11-19.696).

Dans l’affaire rapportée, l’automobile qui ralentissait dans la montée devant le motocycliste arrivant à vive allure, a-t-il eu un rôle quelconque dans l’accident de celui-ci ?

Dans la mesure où la seule présence de l’automobile ne pouvait suffire à caractériser son implication, il revenait au motard d’apporter la preuve que le véhicule dépassé avait joué un rôle dans la survenance de l’accident.

Pour la Cour d’appel, l’automobile n’a joué aucun rôle dans la mesure où, même en l’absence dudit véhicule, le motard serait de toute façon entré en collision avec la chèvre traversant soudainement la chaussée par la gauche parce qu'il n'aurait pu l'éviter eu égard à la vitesse de 70km/h à laquelle il circulait.

La Cour de cassation retient la solution opposée au motif que le motard avait entrepris de dépasser le véhicule le précédant à la suite du ralentissement de ce dernier et l'accident était survenu au cours de ce dépassement, ce dont il résultait que ce véhicule avait joué un rôle dans sa réalisation.

En d’autres termes, l’implication de l’automobile ne résulte pas du dépassement lui-même, mais de ce que ce dépassement a été effectué en raison notamment du ralentissement en montée du véhicule quand bien même ce ralentissement avait été opéré avec prudence et précaution par l’automobiliste.

La solution retenue dans le présent arrêt suit la jurisprudence définie par la Cour de cassation autour de la notion d’implication du véhicule, beaucoup plus large de celle de causalité, et toujours plus étendue au fil des décisions, qui permet de rechercher l’assureur d’un véhicule qui n’est pourtant pas la cause de l’accident survenu ni des dommages subis par la victime.

Cour de cassation, 2ème chambre civile, 12 décembre 2019 (pourvoi n° 18-22.727).

https://village-justice.com/articles/implication-selon-loi-badinter-une-notion-toujours-voie-extension,35393.html
 


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